Premier combat de Bud, le roi du ring

BOXE & CLANDESTINITÉ

Premier combat de Bud, le roi du ring

11 combats, 1 ring, des boxeurs et des poètes, voilà le cocktail du combat de boxe populaire pour lequel s’est préparé intensément Sébastien Borne. Depuis trois mois il s’entraîne au rythme de cinq à six fois par semaine et a perdu 27 kilos depuis septembre. Le 22 mai, Sébastien est parti à Gênes, en Italie, pour faire son premier combat de boxe anglaise. Pour l’occasion, il est accompagné de son entraîneur et de six autres membres de l’association Le Sport Autrement. Nous avons suivi l’équipée pour une plongée au cœur d’un combat de boxe clandestine, sur les pas de Sébastien surnommé Bud sur le ring, en hommage à Bud Spencer.

vendredi 14 août 2015 ()

/ Photo Sonia Barcet.
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Le combat s’est déroulé dans un squat, à Gênes, en Italie. / Photo Sonia Barcet.

«  Je ne sais pas où je vais mettre les pieds »

Depuis trois mois, Sébastien Borne prépare son premier combat de boxe. « On m’a trouvé un adversaire. C’est un Italien qui vit à Gênes. Je ne sais rien sur lui. Je ne connais pas son nom mais je m’en fous. Je sais juste qu’il fait 1m90 pour 87 kg. Il est grand mais je ne sais pas comment il va boxer. Par contre je sais qu’il est médecin. Il y aura au moins un médecin dans la salle. » Le boxeur stéphanois ne s’inquiète pas de cette situation : « Je ne sais pas où je vais mettre les pieds. On part dans l’inconnu, c’est ce qui est bien. Il y aura 11 combats et je passe en dernier. Ça va être chaud. »

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Avant le combat. / Photo Sonia Barcet.

Les bars avant le ring

Il y a un an, Sébastien n’aurait jamais imaginé monter sur un ring. Après avoir bu pas mal de coups dans les bars, le voilà qui paie ses tournées sur le ring : « Pendant dix ans, le seul sport que j’ai fait c’était le bar fixe et les bars parallèles. En septembre 2014, j’ai voulu reprendre le sport. Un ami de comptoir m’a dit qu’il boxait et m’a proposé de venir essayer. A la base, j’y allais juste pour retrouver la forme. J’ai commencé par deux heures de boxe par semaine, plus une heure de remise en forme. A partir de décembre, j’ai fait deux heures de boxe thaï en plus. » C’est lors d’une exhibition de boxe, organisée en février dans un lieu autogéré stéphanois nommé La Gueule Noire, que tout change : « Il y avait des tatamis pour protéger les murs et un ring improvisé. Quand j’ai vu le niveau, l’ambiance et l’organisation cadrée, j’ai voulu en être. »

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Le ring. / Photo Sonia Barcet.
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La pesée d’avant combat. / Photo Sonia Barcet.

Pour devenir Bud, Sébastien a perdu 27 kilos

Quand Sébastien monte sur le ring, il s’appelle Bud, fait 1m75 pour 88 kilos : « Il faut un surnom et une musique. J’ai choisi Bud parce que j’aime bien Bud Spencer. » Mais le chemin a été long et intense : « Au mois de mars on m’a dit que fin mai on pourrait faire un déplacement à Gênes. Mais pour combattre, il fallait que je passe sous la barre des 90 kilos, parce que tu as plus de chance de trouver des boxeurs en dessous des 90 kilos. J’ai dit ‘’ok’’ et on a commencé la préparation à bloc. J’ai fait une grosse préparation technique et physique. Je faisais 115 kilos en septembre, 102 kilos en mars et là je fais 88 kilos. Au départ, à force de bouger, ça fond tout seul mais pour passer la barre des 90 kilos c’est plus compliqué. Je ne perdais plus rien alors que je m’entraînais cinq à six fois par semaine. Ils me faisaient même venir le samedi et le dimanche, pour éviter que je sorte trop le soir. C’était très lourd. Je ne savais pas faire de corde à sauter, par exemple. Maintenant, je t’en fais pendant 45 minutes. J’ai aussi fait un régime et ça, ça a été très très dur. Physiquement tu le sens. Depuis trois mois je n’ai pas mangé de frites ou de trucs gras, mais je n’ai pas arrêté la bière, hein. »

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"Une exhibition de boxe populaire, c’est clandestin mais cadré." / Photo Sonia Barcet.

« C’est clandestin mais cadré. »

« Le match se dispute en quatre rounds de deux minutes, avec une minute de repos entre chaque round. Une exhibition de boxe populaire, c’est clandestin. Je n’ai pas d’assurance, rien. Si j’ai un problème, je dirai que je me suis fait taper dessus. Mais ce n’est pas n’importe quoi. On ne te laisse pas dans la merde. Le combat est cadré. Il y a un arbitre, trois juges... des villes italiennes suivent les mêmes consignes au niveau de la sécurité que les fédérations officielles (ambulances, certificats médicaux...). C’est une exhibition. Le but est de faire de la jolie boxe. Il y a des cartons jaunes pour les mauvais coups et le K.O. est interdit. »

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« 1 je frappe au foie, 2 je cogne au menton, et 3 je fais un enchaînement. » / Photo Sonia Barcet.

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[Découvrez l’intégralité de cet article dans le deuxième numéro de Barré]

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La double-page d’introduction de la version papier de l’article sur la boxe populaire. A lire dans le Barré n°2 !
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Sébastien s’est entraîné avec l’association Le Sport Autrement. A l’initiative du projet, on retrouve notamment Santi et Goretty, qui ont une approche militante de la boxe et du sport en général : « Le sport populaire part d’un milieu militant. L’objectif est de transmettre des valeurs à travers le sport, comme la solidarité, la lutte contre les discriminations (racisme, sexisme, homophobie) ou le dialogue interculturel et intergénérationnel. » Le sport populaire est considéré comme un moyen d’épanouissement et d’ouverture : « L’idée est d’ouvrir le milieu alternatif grâce au sport et de le faire découvrir à d’autres personnes qui ne viennent pas forcément aux concerts et aux débats. » Le mouvement du sport populaire s’est développé depuis une vingtaine d’années en Italie et dans quelques pays européens comme l’Espagne, l’Allemagne et la Suisse : « En Italie, par exemple, il y a deux systèmes de boxe. Soit en mode fédération et donc officielle, soit en boxe populaire qui est en gros de la boxe clandestine. Pour sortir d’une mauvaise image, très violente, on donne généralement des noms aux soirées comme Poings et Poésie. On organise des exhibitions pour montrer justement que les sports de contact peuvent véhiculer des valeurs positives comme le respect, le partage, la solidarité ou la maîtrise de soi. »
  • Les trois combattants (de gauche à droite) : Sébastien, Nacim et (...)

    Les trois combattants (de gauche à droite) : Sébastien, Nacim et Pierre.

    photos : / Photo Sonia Barcet.
  • Avant le combat.

    Avant le combat.

    photos : / Photo Sonia Barcet.
Les combats se déroulent dans des lieux autogérés. Ils sont encadrés mais conservent un esprit militant : « En Italie, la boxe populaire existe depuis plus de quinze ans. Milan, Bergame, Bologne, Venise... là-bas les lieux sont équipés. Ce sont des ‘’Palestra popolare’’ (des gymnases autogérés). Il n’y a pas vraiment d’équivalence en France. Dans la boxe populaire, le niveau est parfois plus élevé que dans la boxe officielle, surtout en boxe thaï. C’est carré. Il y a une fédération alternative avec des instructeurs tout en gardant des valeurs et un esprit militant. » À Saint-Étienne, l’expérience a débuté dès 2011 : « On a commencé dans un lieu autogéré, La Gueule Noire, à l’ouverture de l’espace. On est maintenant dans notre salle associative, Le Sport Autrement, depuis 2014. Tout le monde est bénévole et le but est de proposer des activités pour les gens du quartier. Nous essayons de créer un lieu de partage où chacun peut apporter ses compétences en matière de sport au projet. » Ce lieu stéphanois est précurseur dans l’Hexagone où le mouvement du sport populaire peine à se développer : « En France, ça commence. Il y a quelques initiatives dans des squats mais les infrastructures sont très limitées. »